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Du 17/04 au 29/06 - 2114 km - Champagne/Vezelay/GR10/Camino del Norte et Primitivo/Cabo Fisterra |
Olveiroa / Fisterra / CABO FISTERRA (34 km) - Brumeux - Soleil
Saint-Jacques de Compostelle / ESPAGNE
Samedi 26 Juin 2010
DEJA …
Comme un automate, je prends mes vêtements, me dirige vers les sanitaires et regarde ma montre.
4h50 !!!
Ils sont fous ces pèlerins …
Donc, en pleine nuit, nous partons en compagnie de Gilles et André, nos « éclaireurs ».
Ce dernier mène la troupe d’un pas ardent. Tous trois, avons du mal à suivre sa cadence !
De plus, comme à l’accoutumé, une bonne côte débute notre dernier départ.
Grâce à cette allure, une heure plus tard, nous sommes déjà à Hospital.
A la sortie, une lueur nous attire…
Comme un seul homme, nous décidons de prendre un café avant de nous séparer.
André et Gilles se dirigent sur Muxia, tandis que nous allons sur Fisterra.
Photo souvenir devant la borne marquant la séparation, et à partir de là, chacun suit son chemin.
Et quel beau chemin …
De la lande, des parfums, du calme, de la solitude …
Je suis comblée par cette ultime étape. Je craignais d’y trouver la foule, mais rien de cela !
Personne devant.
Personne derrière.
Cette quiétude me transporte jusqu’au détour du chemin où l’océan (délaissé depuis Colunga) et dans le lointain le Cap – tant espéré – m’apparaissent.
Eblouis, des ailes aux pieds, nous descendons rudement vers le rivage de Cée.
Encore deux heures à parcourir, collines boisées et paseos, et nous voici foulant le sable blanc de la plage de Langosteira.
Et mes larmes vont rejoindre l’océan.
La marrée est basse, et nous suivons le rivage jusqu’au village de pêcheurs où finit la terre …
Vais-je trouver Ma coquille ? Non, juste un petit couvercle !
Sans problème, nous dénichons de quoi nous installer confortablement, et délestés de nos paquetages, nous nous rendons à l’office des pèlerins pour présenter une dernière fois notre crédentiale, obtenir un « sello » et la Compostela de Fisterra.
Puis, nous nous offrons un extra pour nos estomacs.
Mais tout n’est pas terminé.
Quatre kilomètres nous séparent encore du point final.
A mi-chemin, un pèlerin dans le vent (statue) m’inspire. Chacun à son tour, nous prenons la pose. Plus loin, une fontaine nous désaltère, et en repartant, je me rends compte qu’il me manque un verre sur mes lunettes. Demi-tour, en vain.
Tant pis !
Nous sommes devant la borne zéro ! Grosse, grosse émotion.
Ici, le Chemin se termine vraiment.
Il reste une dernière tâche à accomplir.
Au-delà du phare, en descendant, dans les rochers, vers l’océan, nous accrochons la coquille apportée des Vigneaux et allons bruler nos chaussettes trouées face à l’immensité du BOUT DU BOUT.
Sommes-nous devenus des « hommes nouveaux » ?
Je n’en sais rien !
Mais, je sais qu’une fois de plus et malgré mes colères et mes doutes, la volonté a été la plus forte pour me faire avancer…
Après un long moment à contempler l’infini, nous reprenons la route.
Il est dit que le hasard n’existe pas : je tombe nez à nez avec notre jeune Marcus, perdu de vue depuis le 9 juin à Colombres.
Effusion, joie et larmes …
Cette fois, nous nous disons « Adios amigos », chacun ayant accompli son Chemin.
En repassant devant la statue, Serge est certain que nous allons retrouver mon verre de lunette…
Et il a raison !
Sur le socle, il est là, trônant aux pieds de la statue.
Merci saint Jacques …
Puis dans une petite crique, Serge se baigne, tandis que, pour ma part, je me contente d’y tremper mes jambes.
Et nous voici dans le village, à la recherche d’un restaurant de fruits de mer pour ce soir, afin de terminer, en beauté, notre périple.
Demain retour, en autocar, sur Santiago.
Et lundi direction la France, jusqu’à Paris, toujours en car (24h00) afin de reprendre doucement pied dans la vie d’avant…
« Toujours plus loin »
ULTREIA !
Pour l’ultime étape, nous sommes partis à 5h20 du gîte.
J’ai encore eu recours à la « lumière » prêtée par Gilles.
Gilles et André vont sur Muxia.
Nous allons sur le Cap.
Nous marchons de conserve jusqu’à la bifurcation.
Le Québécois ouvre la marche. Il a dû bouffer du lion, car j’ai du mal à le suivre, Edith et Gilles également.
Il fait nuit et de plus, des nuages occultent la pleine lune.
J’aperçois, devant nous, quelques lucioles. Ce sont les lampes d’autres pèlerins.
Nous arrivons à Hospital vers 6h30.
Un bar est ouvert, tout le monde s’y arrête pour prendre une boisson chaude.
Le jour se lève à peine, lorsque nous arrivons au carrefour.
Devant la borne directionnelle, nous immortalisons cet instant.
Puis séparation, deux à droite, trois à gauche.
Nous avançons d’un pas alerte, dans une campagne jalonnée de calvaires et ermita.
Mais, nous attendons un moment particulier : celui où – de nouveau – l’océan se dévoilera. Certes, nous l’avons moult fois côtoyé tout au long du chemin côtier, mais ici, ce sera pour voir le bout.
Le bout du bout !
La partie la plus extrême de l’Europe.
Cependant, une légère brume masque les lointains.
Il nous faut atteindre les hauteurs de Cée, pour voir enfin l’étendue liquide et distinguer, avec peine, le Cap.
Corcubion.
Petite et très belle ville qui s’étale dans le fond d’une baie fermée et protégée par l’avancée du Cap Finisterre.
Le chemin nous fait longer de belles plages de sable blanc : Estorde, Sardiñeiro et surtout Langosteira en forme de croissant de lune sur laquelle nous décidons de descendre sur le sable et de la suivre en limite de marée.
Fisterra. Fin des terres.
Ce lieu depuis l’antiquité est un mythe chargé de légendes.
A partir des débuts du pèlerinage, tous les Jacquets y sont venus.
Nous trouvons, ou plutôt « nous sommes trouvés » par un «hombre» qui propose une albergue privée. Nous le suivons pour voir.
Nous optons pour son « habitacion »
Délestés de nos sacs, nous partons en quête du traditionnel cachet et de la Compostela locale.
Quelques pèlerins de connaissance arrivent.
Les dernières formalités accomplies, nous cherchons de quoi nous restaurer.
Puis, direction le Cap.
En chemin, nous arrivons à la hauteur d’une statue, représentant un pèlerin.
Nous continuons après nous y être photographiés mutuellement.
A quelque distance, une fontaine nous abreuve, un peu plus tard Edith s’aperçoit qu’il lui manque un verre sur ses lunettes. Retour vers la fontaine pour tenter de le retrouver.
Peine perdue …
Nous approchons, et apercevons le phare qui se détache sur le fond azur que forment à la fois le ciel et l’océan.
Didou me confie alors qu’elle n’était pas du tout certaine de parvenir jusqu’ici.
Moi également…
Mais nous y sommes, et sans bobo !
La borne zéro est là, juste devant nous.
Nous confions la boîte à images à un cycliste Italien afin qu’il nous fixe sur la pellicule.
Cette fois, le trop plein d’émotion se manifeste.
Pour respecter la coutume, nous cherchons un endroit où brûler un vêtement. Didou a oublié l’indispensable briquet dans son sac à dos.
On nous en prête un !
Le feu prend rapidement.
La symbolique de cet acte est une façon de proclamer que le voyage vers Compostelle a fait de nous des personnes nouvelles !!!
La coquille transportée depuis la maison et sur laquelle figure nos noms, la date et le lieu de départ, est accrochée à un mat.
C’est à cet instant que je réalise que c’est fini !
Les larmes trop longtemps contenues jaillissent.
Nous nous embrassons …
Nous nous asseyons … et regardons l’infini.
Mes sentiments s’entrechoquent.
Quand à savoir celui qui prédomine ?
- Satisfaction, voire fierté d’être allé encore une fois au bout. Au bout de mon rêve, de moi même.
- Tristesse, abattement devant la fin de cette belle aventure.
- Immense bonheur d’être là !
Et après ?
La question se pose encore une fois.
Oui le retour sera difficile. Dur sera de revenir dans la vie ordinaire, car le Chemin c’est extraordinaire.
Extraordinaire de sensations, de sentiments, de rencontres, de découvertes …
Car, avant de partir, de prendre le Chemin, « on ne sait pas »
Nous ignorons que marcher, souffrir parfois peut se révéler être bon, salutaire également pour l’esprit.
Et parce qu’après cela, le quotidien peut ne pas paraître aussi beau, aussi bien.
Dans deux ans – ou l'an prochain peut être – la Via de la Plata (Séville – Santiago) ?
Fisterra le 26 juin 2010.
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