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LIBERTÉ DE LA PRESSE Le code du recul


Il est pratiquement la copie conforme du code de la presse du Togo. Le député Grémah Boukar n’a pas cherché loin, pour proposer un code de la presse et de la communication censé régir l’espace médiatique nigé-rien.

L’Assemblée nationale a prévu d’examiner cette proposition de loi, le 8 avril. Si le code Grémah a le mérite de supprimer les peines d’emprisonnement en cas de délits de presse, il a cependant le malheur de faire d’énormes confusions et de réhabiliter des délits d’un autre âge comme l’offense à chef d’Etat…

Ce qu’on qualifiait de crime de lèse majesté. En vérité, ce code permettra de mettre toutes les têtes couronnées et tous ceux qui sont quelqu’un, à l’abri des critiques des journalistes. Ceux des médias qui ne seront pas sages crouleront sous le poids d’amendes exagérément lourdes. Mais conformément à la loi, cette proposition de ce code de la presse et de la communication doit préalablement passer par le filtre du Conseil supé-rieur de la communication (CSC). Cette procédure pourtant légale a été superbement ignorée. Ce contournement de la loi constitue en soi un acte de nullité de cette proposition de code.

De toute évidence, le code Grémah n’est pas de nature à renforcer et consolider l’espace de libertés, notamment la liberté de la presse. Il constitue un grave recul par rapport à l’existant, au regard de la confusion des termes et de l’amalgame qu’il entretient. Un texte de loi doit être clair et précis. Ce qui n’est pas le cas de ce code au point de se demander si c’est un texte qui parle de liberté de la presse, de propriété intellectuelle ou des deux en même temps. Car beaucoup de ses dispositions renvoient à la propriété intellectuelle. On parle de « prête-nom » sans savoir de quoi il s’agit exactement, en con-sidérant que c’est là un problème. On rencontre des prête-noms notamment chez les artistes ou les écrivains. Il y a ce qu’on appelle le nom d’artiste. Cela ne constitue nullement un problème. Les pseudonymes, chez les journalistes, n’en constituent non plus une violation de la loi ou des règles de ce métier. Alors où est le problème ?

Le code confère la gestion de la liberté de la presse au CSC qui est une autorité administrative, alors que cette fonction est exercée jusqu’ici par le juge, en tant qu’il est gardien des liber-tés et rempart contre tout arbitraire. Tout en ignorant l’ordonnance sur la communication audiovisuelle, la proposition du code développe des impertinences sur la qualité du journaliste, les moyens de poursuite du Procureur, les possibilités de preuve pour un journaliste qui dirige un débat qui n’a plus la possibilité de faire part de ses efforts à empêcher des dérapages par exemple… Ce code est anachronique. Il mérite d’être rejeté purement et simplement. Convaincu qu’il constitue un grave recul pour l’enracinement de la démocratie et de la liberté de la presse au Niger, le gouvernement a jugé ce code mauvais et a donc donné un avis défavorable. Il y a un principe incontournable, nous sommes dans un contexte de libertés.
On ne peut, même de façon subtile, utiliser des fards pour vouloir enchaîner la liberté de la presse. C’est inacceptable.

Oumarou Keïta
Source:
http://www.republicain-niger.com/index. ... et+culture