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Vous avez la particularité d'être en même temps, député national au titre de la région d'Agadez, 4ème vice-président de l'Assemblée nationale et maire de la commune rurale d'Iférouane. Comment vivez-vous cette expérience ?
Effectivement, ce cumul représente pour moi un vrai défi. Car c'est une expérience tout à fait nouvelle, puisque c'est la 1ère fois que nous avons organisé des élections locales qui permettent d'être maire, et qu'il est admis par les textes légaux de cumuler cette fonction avec d'autres mandats,
“Les Nigériens qui ont été amenés, pour une raison ou une autre, à faire recours à la violence, doivent déposer les armes pour privilégier la voie du dialogue” notamment le mandat législatif. Il m'est en effet donné d'être à la fois maire d'une commune rurale, en l'occurrence celle d'Iférouane et député au titre de la circonscription régionale d'Agadez, ceci depuis 2004. J'avoue que c'est une expérience intéressante, très intéressante même, mais extrêmement délicate parce que les attentes sont très fortes des deux côtés : au niveau de la jeune commune qui venait d'être créée et où il fallait faire les premiers pas, tout construire, et au niveau du parlement où j'occupe par ailleurs le poste de 4ème vice-président. Mais, le défi le plus difficile, le plus lourd est d'ordre physique et géographique. En effet, comme vous le savez, la distance qui sépare Iférouane de Niamey est d'au moins 1300 kilomètres. La navette pour relier ces extrémités de notre territoire s'avère donc très laborieuse. C'est aussi harassant sur le plan travail, à partir du moment où nous sommes une jeune commune où il fallait partir de rien. Il faut mettre en place une administration, réunir régulièrement les conseillers qui sont éparpillés dans une zone à 80 % nomade, faire marcher cette commune située dans une zone nomade, ou disons semi-nomade, puisque la commune d'Iférouane a la particularité d'être composée d'oasis où les populations pratiquent les deux activités, l'agriculture et l'élevage. Mais tous ces problèmes sont surmontables si les ressources matérielles et financières sont disponibles. Or, sur ce point, nous sommes pratiquement démunis, n'eut été l'apport de AREVA qui nous appuie, depuis 2006, en matière d'investissement. Et nous arrivons effectivement, grâce à ce partenaire, à réaliser cette infrastructure. Il y a également l'apport de l'Etat qui, depuis 2002, verse aux communes de la région une part (15%) de certains impôts sur les sociétés minières rétrocédés par la loi. Mais le comble de nos difficultés, c'est que dès 2007, pratiquement deux ans après la mise en place de la commune, il s'est posé le problème de l'insécurité qui a totalement déstabilisée la zone et éparpillé nos efforts. Tous ces facteurs conjugués ont donc rendu la vie difficile au député et au maire, pour ne pas dire impossible. Mais grâce à Dieu, nous tenons le coup. Avec l'aide de Dieu, nous sommes entrain de vivre une expérience qui permet de se former à la vie et de voir comment on peut faire face aux défis les plus divers et les plus complexes.
Vous avez tantôt évoqué l'épineux problème de l'insécurité dont les effets ont reporté toutes vos ambitions de développement de la zone. Comment se présente aujourd'hui la situation au niveau de la zone d'Iférouane ?
Ce problème d'insécurité est lié essentiellement au conflit armé qui s'est déclenché précisément en février 2007, suite à une attaque perpétrée sur la case militaire d'Iférouane. Et la situation s'est progressivement dégradée, au point où on est arrivé, quelques mois après, à un déplacement massif des populations de la commune. La moitié de la population, soit environ 5000 habitants, a été amenée à quitter ses lieux d'habitation. Certains habitants sont restés, malgré tout, dans les parties sud de la commune. Tout ceci s'est passé à partir du mois d'octobre 2007. Ce n'est que tout récemment, précisément en janvier 2009, que nous avons eu une accalmie, après que certaines conditions sur le terrain ont été créées et qui nous ont permis d'amorcer le processus du retour et de la réinstallation de ces populations. Actuellement, il y a un peu moins de 50 % des gens qui sont effectivement retournés dans la ville d'Iférouane, dans sa périphérie proche et qui sont entrain de mener leurs activités. Vous avez posé la question des conséquences de cette crise. Bien sûr, cette crise a eu des conséquences néfastes sur ces pauvres populations. D'une manière générale, ce conflit a eu des conséquences négatives, et même parfois désastreuses, sur l'ensemble de la région d'Agadez, et sur le Niger dans son ensemble. Pour le cas que je connais, celui de la région d'Agadez et plus particulièrement la commune d'Iférouane, les conséquences sont multiples et de divers ordres. Nous avons déploré des pertes en vies humaines ; lorsque des soldats tombent sur le champ d'honneur ou lorsque d'autres Nigériens sont tués, ce sont des frères, des bras valides qu'on perd. Je pense que sur le plan humain, ce conflit a été désastreux. Nous avons beaucoup d'orphelins et de veuves qu'il faut aujourd'hui prendre en charge. Ce sont des cas sociaux. Sur le plan économique, c'est tout aussi grave parce que, vous connaissez que la vocation première de la région d'Agadez, c'est le tourisme. Mais cela fait deux ans que cette activité est réduite au niveau zéro à cause de ce conflit. C'était des milliards qui étaient investis ou qui rentraient grâce aux activités des agences de voyages, des opérateurs du tourisme, des hôteliers et autres. Or cette activité s'est trouvée totalement anéantie, ce qui est une perte sèche pour la région et pour le pays tout entier. Sur le plan agricole, les activités sont aussi au ralenti.
Vous savez que cette zone dispose de plusieurs oasis où il y a une production agricole et maraîchère 12 mois sur 12. Il y a la filière d'oignon qui rapporte des milliards aux paysans. Mais depuis que l'insécurité s'est installée, tout marche au ralenti. L'activité est même réduite à néant dans certaines zones. Ce qui constitue une perte considérable pour l'économie de la région, mais aussi pour l'économie nationale, puisque comme le savez, cette production, notamment celle de l'oignon, est exportée vers l'extérieur. Dans le domaine de l'élevage, de nombreuses pertes d'animaux ont été enregistrées. C'est dire qu'aussi bien au plan humain qu'économique et social, les conséquences sont tout simplement désastreuses. Sur le plan culturel, les conséquences sont également désastreuses puisque il n'y a plus les manifestations culturelles qui faisaient la fierté de cette région comme la curée salée, le festival de l'Aïr, etc. Tous ces rassemblements extrêmement importants, chargés de symboles, de facteur d'unité et de symbiose, ont disparu parce qu'on ne peut pas les tenir pour raison d'insécurité. Là aussi les pertes sont énormes.. Imaginez que pour aller à Agadez ou pour venir d'Agadez, d'Arlit, de Bilma et de Zinder, il faut toujours une escorte militaire. Vous conviendrez avec moi que ce n'est pas facile. Ce n'est pas du tout quelque chose qui doit continuer; on doit œuvrer pour que la liberté de circulation soit rétablie. Voilà donc un peu les conséquences d'une telle situation. Il est bien vrai qu'on ne peut pas tout retracer. Elles sont inestimables, on ne peut pas chiffrer les dommages qui en résultent, elles dépassent tout ce qu'on peut imaginer comme manque ou perte.
On connaît l'engagement dont vous-même aviez fait preuve en vue de trouver une solution rapide et heureuse à cette crise d'insécurité au Nord du pays. Quel serait, aujourd'hui encore, l'appel que vous aimeriez lancer en vue d'éviter à l'avenir ce genre de situation déplorable ?
Des appels, je crois que nous en avons déjà lancés beaucoup, aussi bien individuellement que collectivement. Nous avons, depuis 2007, entrepris plus d'une vingtaine d'initiatives avec les élus locaux, des chefs traditionnels ou les députés de la région d'Agadez. En 2007 et 2008, il y a eu énormément d'appels de la part des députés, des conseillers locaux, des leaders d'opinion et des chefs traditionnels. Nous sommes venus apporter un message de paix au Président de la République qui nous a bien écoutés. Nous sommes allés jusqu'en Libye porter ce message au Guide de la Révolution libyenne, Haut médiateur de la CEN-SAD. L'Assemblée nationale a eu également à faire plusieurs fois des déclarations qui traduisent la volonté du peuple qui s'est exprimé à trois (3) reprises et chacune de ces déclarations condamne les violences et recommande la résolution des problèmes par la voie pacifique, par la voie du dialogue qui, je le répète, est la voie d'or par excellence. Il faut savoir les gérer pacifiquement. Si nous devons avoir un mérite, c'est celui de pouvoir régler nos problèmes par l'intelligence, par la réflexion et par le dialogue. La seule force qui vaille, c'est celle de dissuader, de convaincre, de persuader, car nous avons plus intérêt à vivre ensemble dans la symbiose et dans un climat de paix et de fraternité.
Pour réaliser ce noble objectif, les initiatives n'ont pas manqué. Mais malheureusement, nous avons constaté que nous n'avons pas été entendus. Mais nous ne croyons pas que notre cause soit perdue. Nous avons espoir que la sagesse va toujours prévaloir pour qu'enfin de compte, les uns et les autres entendent et acceptent l'appel au retour de la paix. Pour moi, le dialogue doit être permanent et tous les engagements pris doivent être respectés et suivis en permanence également. C'est cela la gouvernance que nous appelons de tous nos vœux, pour effectivement vivre dans la paix et l'harmonie, dans un Niger uni que nous voulons de tous nos cœurs. Il n'est pas question, au 21ème siècle, qu'il y ait des velléités d'anarchie, de séparation ou de clivage quelconque. Nos nations doivent parachever leur construction dans la symbiose. Toutes les ethnies forment aujourd'hui un seul Etat, une seule Nation, et les dirigeants ont pour rôle de les amener dans cette dynamique de paix et de cohésion. L'appel que je dois encore lancer est le suivant : les Nigériens qui ont été amenés, pour une raison ou une autre, à faire recours à la violence, doivent déposer les armes pour privilégier la voie du dialogue. Cela est possible, car au Niger, nous sommes une famille.
Pour le cas particulier de la commune d'Iférouane, nous avons bénéficié, grâce à Dieu, à partir de janvier 2009, d'un moment de répit qui nous a permis d'aider les populations à revenir sur leur terre et vivre dans leurs habitations, bien que ces dernières soient dégradées, voire détruites dans certains cas. Petit à petit, la vie reprend, non sans difficultés, son cours normal, et nous nous en félicitons. C'est le lieu de réitérer notre appel à l'Etat et aux partenaires au développement pour aider les populations victimes de ce conflit, qu'elles soient d'Iférouane, de Dabaga, Gougaram et ailleurs, à palier leurs besoins d'urgence, au plan alimentaire notamment, et à reconstituer leurs capacités de production.
Réalisée par Assane Soumana
En tant que député et maire de la commune d'Iferouane et étant en contacte étroit avec les populations je puis vous assurer que les exactions et les assassinats dont ont souffert ces populations sont l'œuvre des forces de défense et de sécurité qui ont eu un comportement plusqu' inadmissible dans un État de droit.Je puis enfin vous dire que dans la crise actuelle le gouvernement a fait acte d'amateurisme béat dans sa politique de gestion de conflit.L'intauration de la mise en garde reconduite à plusieurs reprises à été perçue par les populations comme une punition collective, qui s'écarte véritablement des conditions à mettre en place pour l'épanouissement de ces populations.il s'agit de gouverner et non de régner.
Aujourd'hui que le gouvernement semble se rendre compte de son erreur, et face à l'echec de l'option militaire qu'il opte pour la solution négociée après deux ans d'une guerre insensée je ne peux que encourager les acteurs à plus de responsabilité pour un diagnostic sincère des racines profondes de ces crises récurrentes afin que cette rébellion soit vraiment la dernière: que plus jamais des nigériens ne soient amenés à prendre les armes pour se faire entendre."
voila me semble t il une manière plus responsable dont un représentant de ces populations doit parler. On ne peut pas représenter une population et tenir des discours équilibristes pour plaire à Tanja et bénéficier ainsi de ses largesses. Quand on a peur à ce point de dire la vérité il faut tout simplement démissionner pour rester en conformité avec sa conscience.
A moins que les tares et réflexes de la période militaire ne l'emportent sur les nécessaires sacrifices en Démocratie.
Awinnane
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